mardi 17 février 2015

Loi Macron : ce 49.3 qui arrange toute la gauche ...

Alors, comme ça, Manuel Valls appelle l’article 49-3 au secours de l'adoption du projet de loi Macron (1), disant ne pas vouloir prendre le risque d’un rejet ? 
Pourtant, Valls disait qu'il était sûr d'obtenir une majorité pour ce projet de loi qui abordait divers sujets, pas de façon entièrement libérale d'ailleurs. 

Quand on pense à ce que le Président Hollande disait du recours au vote bloqué par le biais de l'article 49-3 de la constitution de 1958, souvenez-vous, c'était en 2006 (2) :





Alors, pourquoi ce recours au 49-3 arrange tout le monde, alors qu'il pousse le premier ministre Manuel Valls à empécher le débat parlementaire à ne pas prendre le risque d'un rejet ? 

D'une part, c'est évident, il arrange le gouvernement et ce groupe de socialistes "réformistes". Leur problème, c'est que Hollande a menti en 2012, durant la campagne des présidentielles. Hollande, pour se faire élire, a dit à son électorat de gauche et d'extrême gauche qu'il allait rompre avec le sarkozysme. Pour séduire l'électorat extrémiste de gauche (pendant que Sarkozy tentait de gagner les voix de l'électorat extrémiste de droite), Hollande a multiplié les propos démagogiques (taxe à 75%, discours du Bourget anti finance), les attaques grossières niant la réalité (débat de l'entre deux tours et la tirade Moi Président) et les propos nauséabonds (hommage à la culture communiste). Les députés qui s’appellent les frondeurs, la gauche du PS, sont les  légataires universels et exécuteurs testamentaires du programme de 2012. Ils ont raison de dire que Hollande n'a pas été élu pour mener une politique très proche de celle menée par Sarkozy entre 2007 et 2012, à la fois ultra étatiste mais comportement quelques tentatives de réformes. 
Le recours au 49-3 évite d'avoir à réouvrir la question du positionnement du PS, puisque tel est le débat sous jacent, et la question de l'absence de majorité pour Valls et Hollande.

D'autre part, le recours au 49-3 arrange aussi les frondeurs. En effet, les frondeurs sont des députés élus dans le sillage de la victoire de Hollande en 2012. Qu'est ce qui destinait la génération UNEF ID à avoir autant de députés, si ce n'est l'alignement entre majorité présidentielle et majorité parlementaire, rendu possible par le passage au qquinquennat? Pas grand chose, si ce n'est le très légitime rejet dont a souffert l'UMP de Sarkozy, Guaino, Wauquiez ou Hortefeux en 2012.
Est-ce que les frondeurs ont envie de dire à leurs électeurs qu'ils n'ont pas voté la loi Macron ? Oui. Est-ce que les frondeurs ont envie de se représenter devant leurs électeurs ? Non, ou alors, pas sur. En effet, même si Hollande a été obligé de tenir compte du réel sur un certain nombre de points, notamment au niveau économique, il y a des domaines sur lesquels le PS a carrément laissé tombé, sans qu'il ne puisse reporter la faute sur quelqu'un d'autre. L'abolition de la défiscalisation des heures sups, la hausse de la TVA, la hausse de la CSG, l'absence de renégociation des traités européens, le choix de l'engagement accru au sein des guerres de l'OTAN, ce n'est la faute ni de l'UMP, ni de Merkel.   

L'absence de débat est donc un bon deal pour les deux parties. Le gouvernement peut passer à l'étape suivante, sans craindre le fait que des frondeurs votent une motion de censure contre le gouvernement (ce qui ouvrirait la voix à de nouvelles élections), et les frondeurs pourront continuer à vouer aux gémonies une loi qu'ils jugent ultra libérale, tout en faisant mine de se réfugier derrière l'autoritarisme du gouvernement. 

Bien joué !

Bruno le Roux, Manuel Valls ou François Hollande ne sont peut être pas Franck Underwood, certes, mais ils sont des dignes héritiers de Mitterrand. Tant pis si les vérités sont relatives. En socialie, rien n'est jamais définitif. 



1 commentaire:

  1. J'aime bien votre article. Deux petites remarques :
    1 - "En socialie, rien n'est jamais définitif" : on était prévenu, le changement c'est maintenant, sauf qu'on a fait un léger contresens sur cette formule.
    2 - Le 49-3 arrange aussi la droite. Gros dilemme : voter pour la Loi Macron au risque de retomber dans le piège d'un UMPS délétère ? Voter contre, c'est à dire contre ses propres idées (même si pour certains on se demande) ? Mais ouf tout va bien, on ne vote pas et on peut se concentrer sur l'absence de majorité du gouvernement, sur l'utilisation du 49-3 etc..
    Perso, je trouve que cette loi va dans le bon sens, mais elle est tellement mal ficelée et microscopique que je ne sais pas trop si je l'aurais votée ou non.

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